«
… et
déchargez-vous sur lui de tous vos soucis, car lui-même prend soin
de vous »
1 Pierre 5, 7
Parfois,
notre premier rendez-vous matinal est celui avec nos soucis. Nous
avons souvent des préoccupations, nous nous faisons souvent du
souci, mais une recherche montre que la plupart d’entre eux sont
superflus: en gros 40% des choses que nous craignons n’arrivent
jamais ; 30% concernent le passé et nous sommes préoccupés
par leurs conséquences, leurs effets; 12% concernent la santé ;
10% sont des soucis mineurs et seulement 8% d’entre eux sont
légitimes (faire la différence entre les pertes réelles,
imaginaires et les menaces de pertes).
En
tant que croyants, nous avons des possibilités spéciales de gérer
les soucis. Paul nous les décrit : « Ne
vous inquiétez de rien; mais en toutes choses faites connaître à
Dieu vos besoins par des prières et des supplications, avec des
actions de grâce. Et la paix de Dieu, qui surpasse toute
intelligence, gardera vos cœurs et vos pensées en Jésus-Christ »
Philippiens 4, 6-7.
La
prière est un moyen puissant de se débarrasser de ses soucis. Nous
devrions confier à Dieu l’affaire concernée, et lui laisser
l’opportunité d’agir. Il a mille solutions à chacun de nos
problèmes, auxquels nous ne voyons pas d’issue. Et la gratitude
exprimée nous rappelle que Dieu nous a souvent aidé(s) et que nous
pouvons placer en lui notre confiance.
Mais
la prière n’est pas tout. Pierre l’a compris en disant :
« … et
déchargez-vous sur lui de vos soucis, car lui-même prend soin de
vous ».
Il montre donc clairement que Dieu ne nous enlève pas simplement nos
soucis, si nous le lui demandons. Nous avons un part active à jouer,
en nous en déchargeant, en tournant la page, en laissant le paquet !
C’est
une image parlante, qui veut dire qu’il faut les jeter, les lancer.
Avez-vous déjà vu un enfant qui apprend à lancer un ballon ?
Souvent il fait le geste de lancer, mais garde la balle dans sa main.
Il doit apprendre à la lâcher au bon moment. Ce n’est que dans ce
cas que le lancer réussit.
Il
en est de même de nos problèmes et soucis : certes nous les
amenons jusqu’à Dieu par la prière, mais nous ne lâchons pas
vraiment prise, nous ne nous en débarrassons pas vraiment, et nous
continuons à être préoccupés et assaillis par eux. Nous ne vidons
pas le sac qui commence à peser bien lourd, et nous continuons à
les trimbaler, ralentissant notre marche an avant !
Il
est nécessaire de conscientiser, que désormais mes soucis
appartiennent à Dieu, et qu’il s’en occupe. Il vaudrait donc
mieux nous préoccuper de choses positives, par exemple de louer Dieu
et de le remercier, vaquer à nos affaires quotidiennes et aider
d’autres gens. Nous découvrirons alors que beaucoup d’entre,
eux, ont des soucis plus grands que les nôtres. Nous pouvons leur
faire part de l’offre d’aide émanant de Dieu et les en faire
bénéficier.
Il
est vrai que tant de choses encombrent nos vies ! Il y a bien
sûr la dimension matérielle : trop d’objets, trop de choses
matérielles inutiles qui prennent de l’espace, trop d’activités,
trop de sollicitations, trop d’engagement, mais plus assez de temps
ou d’énergie !
Il
y a aussi l’encombrement mental et cognitif, les idées arrêtées,
les croyances erronées, les préjugés, les convictions immuables et
non examinées, les convictions indéboulonnables.
Sur
le plan émotionnel, aussi, tant d’éléments nous encombrent :
vieilles rancunes, haines durables, fermeture aux autres, désirs de
vengeance, besoin d’avoir toujours raison.
Il
y a aussi les souvenirs douloureux que nous arrosons régulièrement
au lieu de les laisser disparaître petit à petit dans le vent du
temps.
Finalement
il y a l’encombrement spirituel, tous les jugements posés sur les
autres, sur ceux qui ne croient pas comme nous, toutes ces peurs qui
nous ont été transmises d’un Dieu vengeur et implacable, toute
cette culpabilité à identifier et à déposer.
Se
désencombrer,
c’est vivre un processus par lequel nous nous défaisons de ce qui
est superflu, inutile, lourd, nocif pour soi et autrui, dans le souci
de nous simplifier la vie pour y retrouver l’essentiel.
Désencombrement
matériel
C’est
souvent le plus facile à entreprendre. C’est concret et pratique.
Il suffit de choisir un secteur de l’appartement ou de la maison,
et de décider de donner ou de se débarrasser de tout ce que l’on
n’emploie plus. C’est l’occasion de libérer de l’espace, de
simplifier l’entretien de la maison, de consacrer plus de temps à
des choses importantes, de redéfinir les priorités. Il est possible
de commencer par des vêtements : chacun conserve cet habit un
peu trop petit pour le jour où il aura perdu ces quelques kilos qui
l’empêchent d’être la silhouette idéale rêvée. Cette
attitude empêche de vivre au présent, de s’accepter juste pour
maintenant (au lieu de se projeter continuellement dans un avenir
hypothétique ou virtuel).
A
la cuisine aussi il y a tant de « gadgets » inutiles, tant de
vaisselle superflue !
La
cave et le grenier peuvent aussi être vidés, ce sera tout cela de
moins à faire lorsque vous déménagerez. Il s’agit moins de jeter
que de donner plus loin, de céder à plus nécessiteux.
Désencombrement
mental
On
peut prendre la décision de ne plus juger les autres, de cesser de
tout catégoriser dans des tiroirs immuables et hermétiquement
fermés. Au lieu de juger ou de condamner, on peut laisser la porte
ouverte et dire : « c’est surprenant », « c’est
original ». « c’est incompréhensible pour moi ».
En effet, il est difficile de se plonger dans la logique de l’autre,
de percer le mystère de sa spécificité, de son altérité.
Se
désencombrer mentalement, c’est prendre la pleine responsabilité
de ce qui me concerne, de ce que j’ai compris dans ce que Dieu m’a
transmis dans sa Parole, par la conscience, par mon vécu, sans pour
autant blâmer ou critiquer ce que font ou pensent les autres, au
bénéfice d’une expérience différente de la mienne. C’est être
passé du jugement, de la fermeture ou du reproche à la disposition
à comparer, à discuter et à échanger.
Désencombrement
émotionnel
C’est
certainement le plus difficile. Il est bien sûr lié au
désencombrement mental car notre versant énergétique, nos émotions
et nos sentiments, sont en relation étroite avec notre versant
représentatif (nos pensées, nos manière de voir), et nos
interprétations des événements vécus. Il constitue ce qui est la
source principale de notre impression de bien-être ou de mal-être
dans la vie.
Se
désencombrer émotionnellement c’est ajouter à la gestion du
passé (dont on tire des leçons) et de l’avenir (la capacité
d’anticiper), la pleine immersion dans le présent, en sachant que
malgré les assurances et les certitudes acquises, il reste une forte
part d’imprévus et d’imprévisible, de surprises (bonnes ou
mauvaises), d’aventures (à découvrir). Il ne sert pas à
grand-chose de se lamenter sur les occasions perdues ou les
rendez-vous ratés, et nous sommes invités à vivre chaque jour
pleinement. De ce point de vue, hier c’est l’histoire, demain est
un mystère, et aujourd’hui est un cadeau du ciel, c’est
peut-être pour cela qu’on le nomme présent ! A nous de
l’accueillir les bras ouverts, car « le
présent ne se représente pas, il se présente »
(Maxime GIMENEZ, Guérison
spirituelle. Où conduit l’expérience de la maladie et de la
guérison,
Les Editions du Cerf, Paris, 2007, p.44).
L’évangile
exprime cette même idée : « C’est
pourquoi je vous dis : Ne vous inquiétez pas pour votre vie de
ce que vous mangerez ni pour votre corps, de quoi vous serez vêtus.
La vie n’est-elle pas plus que la nourriture et le corps plus que
le vêtement ? Regardez les oiseaux du ciel : ils ne sèment
ni ne moissonnent, et ils n’amassent rien dans les greniers; et
votre Père céleste les nourrit. Ne valez-vous pas beaucoup plus
qu’eux ?... Ne vous inquiétez donc pas du lendemain, car le
lendemain aura soin de lui-même. A chaque jour suffit sa peine
» Matthieu 6, 25-26 et 34.
Se
désencombrer émotionnellement c’est aussi cesser de croire que
quelqu’un d’autre agira à ma place et assumer pleinement ma
responsabilité personnelle, ici et maintenant.
Désencombrement
spirituel
Se
désencombrer spirituellement, c’est « déposer toutes nos
valises », au pied de la croix, qu’elles soient matérielles,
mentales, cognitives émotionnelles, spirituelles ou autres, en nous
disant que désormais elles ne nous appartiennent plus. C’est-à-dire
les difficultés, les tristesses, les rancunes, les colères, les
jalousies, les culpabilités, les hontes de nos parents, de nos
proches, toutes ces réalités qui sont toxiques et empoisonnent nos
histoires personnelles, alors qu’en réalité elles relèvent de
nos histoires familiales et collectives, et que nous les portons
inutilement, par loyauté filiale et par solidarité inconsciente.
Comme
le déclare G. AURENCHE dans l’ouvrage collectif Itinéraires
vers Dieu ,
publié par l’Association des Ecrivains croyants d’expression
française, Edition Médialogue, Paris 6, 1985, p. 21 :
« lorsqu’il
pardonne, Dieu ne ferme pas les yeux sur un passé, mais il nous
ouvre nos yeux sur un avenir possible avec lui ».
Jean-Michel MARTIN |