Un corps articulé: une tête qui pense; un visage qui
sourit ou qui s'assombrit; des yeux pour découvrir et pour pleurer; une voix pour chanter
et pour bénir; des bras qui s'ouvrent ou qui se ferment; un cur qui accueille ou
qui s'endurcit; des jambes pour courir vers l'avenir; mais aussi des mains... Main qui
caresse ou qui corrige; main qui paraît ou qui agit; main qui soutient ou qui rejette;
main qui guérit ou qui meurtrit; main qui partage ou qui néglige; main qui s'engage ou
qui défie. |

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La main, prodigieux instrument, d'une adresse remarquable,
d'une force surprenante et d'une précision remarquable, permettant au cerveau de
réaliser ce que son intelligence conçoit. Mains jointes pour prier et s'en remettre à
Dieu: |
1. La main de Dieu:
Elle a créé le monde: "Au commencement Dieu créa les cieux et la terre..."
(Genèse 1,1). Acte d'amour, donnant la vie et un sens à la vie, permettant l'existence
et fournissant des raisons d'exister. "Tes mains m'ont façonné..." (Job 10,8).
Ouvrage de qualité, création parfaite, sortie de l'artiste aux "mains de
maître": "Dieu vit que cela était bon...". (Genèse 1,25). "...
C'est toi qui as formé mes reins, qui m'a tissé dans le sein de ma mère. Je te loure
d'être une créature si merveilleuse..." (Psaume 139, 13-14).
Démarche de liberté, laissant à l'homme le choix, mais prenant le risque d'une réponse
inadaptée ou négative, entraînant la chute, la séparation, le péché (en hébreu
péché signifie rater la cible).
Du coup le travail devient pénible, une vraie corvée: "...le sol sera maudit à
cause de toi. C'est à force de peine que tu en tireras ta nourriture tous les jours de ta
vie..." (Genèse 3,17).
Dieu intervient de sa propre main pour punir la méchanceté humaine et pour rééduquer
sa créature désobéissante: il pourvoit lui-même au sacrifice nécessaire à la
réparation; la main divine agit par celle de l'ange pour chasser nos premiers parents...
Plus tard il permet le déluge quand la méchanceté humaine atteint son comble; mais là
aussi dans un but pédagogique: celui qui obéit, comme Noé (et sa famille), qui
construit l'arche, peut échapper à la main divine de la rétribution pour se réfugier
dans la main divine de l'amour, et faire l'expérience du pardon et de la réconciliation,
exprimée par l'arc-en-ciel et le sacrifice offert.
Le peuple de Dieu qui désobéit est comme l'argile, et la main de Dieu détruit le vase
du potier: "...Voici, comme l'argile est dans la main du potier, ainsi vous êtes
dans ma main...je parle d'arracher, d'abattre et de détruire... mais si la nation sur
laquelle j'ai parlé revient de sa méchanceté, je me repens du mal que j'avais pensé
lui faire..." (Jérémie 18). Dieu ne détruit pas par plaisir, pour faire le mal: sa
main abat pour reconstruire, pour éduquer et redresser. Dieu est amour, il a le
"cur sur la main". Il étend sa main comme une mère-aigle, qui protège
ses petits sous ses ailes: "...Il a pris soin de son héritage, il l'a entouré, il
l'a gardé comme la prunelle de son il... Pareil à l'aigle qui éveille sa couvée,
voltige sur ses petits, déploie ses ailes, les prend, les porte sur ses plumes...
L'Eternel a conduit son peuple..." (Deutéronome 32, 10-11).
Dieu tient à moi quand il me dit: "Je t'ai gravé sur ma main" (Esaïe 49,16).
Sa main est puissante, tendue pour accueillir, ouverte pour protéger; prête à
reprendre, celui qui s'en dessaisit, disposée à fortifier celui qui l'invoque. Main qui
a prouvé l'immensité de son amour en envoyant son Fils unique.
2. La main de Jésus:
D'abord menotte d'un bébé: "...La main de l'Eternel était avec lui" (Luc
1,66). Main fragile qui a attiré les Rois Mages.
Mains bienveillante disposée à accueillir et à bénir les petits enfants: "... Il
les prit dans ses bras et les bénit, en leur imposant les mains" (Marc 10,16). Main
consolatrice, bénissante, à l'uvre de différentes manières: n'hésitant pas à
chasser du temple ceux dont les mains étaient souillées par les affaires, main forte
mais sans violence (Jean 2,13ss); main sanctifiée qui a fait du bien à l'étrangère, à
la Samaritaine rejetée et marginalisée (Jean 4); main qui diffuse un parfum de paix;
main qui a répandu un baume de pardon dans bien des curs tristes et abattus; main
qui a soigné les corps et les esprits; main qui a partagé le pain avec les disciples,
avec les compagnons de route (compagnon "cum/pane" signifie partager le pain);
main qui a accepté de laver les pieds de l'homme, symbole du service rendu (Jean
13,1-17);

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main qui a porté la croix, main qui accepté la main tendue de l'ami pour atténuer le
poids de la souffrance et de la solitude; main clouée, bras étendus, être brisé mais
confiant, qui a dit à son Père: "...je remets mon esprit entre tes mains..."
(Luc 23,46).
Les
mains de Jésus
Le roi de l'univers,
Créateur du ciel et de la terre,
A voulu, pour nous sauver,
Prendre les mains d'un charpentier.
Pas les mains d'un écrivain,
Ni celles d'un philosophe,
Aux mains d'un rentier,
Il a préféré celle d'un ouvrier.
Ses mains ont connu le bois,
Plus que l'argent ou le papier
Elles ont rencontré le fer,
Elles ont lutté contre la pierre.
Ses mains n'ont jamais frappé,
Ni déchiré, ni fait pleurer.
Elles ont connu pourtant
Toutes les blessures du temps.
Ses mains ont touché et guéri,
Des lépreux, des aveugles, des fiévreux;
Mains d'un serviteur de Dieu
Souvent tourné vers les cieux.
Ses mains ont béni des enfants,
Elles ont encouragé des parents.
Elles savent partager le pain
Et distribuer le vin.
Regarde aujourd'hui ses mains,
Pleines de tendresse,
Ses mains blessées
Pour donner à ta vie
Un goût d'éternité.
Auteur inconnu. |
3. La main de l'homme:
Main qui travaille: laboure la terre, vaque à sa besogne difficile. Main qui a construit
la Tour de Babel, dans un élan d'orgueil au milieu de la confusion des langues et des
esprits (Genèse 11, 1-8).
Main de Moïse, portant la loi gravée du doigt de Dieu (Exode 20).
Mains de Jacob, l'homme révolté en lutte avec son Dieu, ne cessant le combat qu'après
la bénédiction reçue (Genèse 32, 24-31). Mains d'Isaac, trompé par ce même Jacob,
l'usurpateur (Genèse 27), puis mains de Jacob, vaincu et humilié, priant Dieu et lui
demandant pardon. Mains de la réconciliation entre Jacob et Esaü, les "frères
ennemis" qui se retrouvent, après bien des peurs: "...Délivre-moi de la main
de mon frère, car je crains qu'il ne vienne et me frappe" (Genèse 32,11).
"...Accepte de ma main mon présent..." (Genèse 33, 10: Jacob implorant le
pardon de son frère bafoué, Esaü).
Attitude du croyant qui s'ouvre à son prochain, pour vivre en paix avec lui: "...ils
nous donnèrent la main d'association..." (Galates 2,9).
Attitude de Pilate, qui ne veut assumer ses responsabilités, l'homme qui "s'en lave
les mains" (Matthieu 27,24).
Mains de l'homme qui prie, qui rend grâces, qui s'unit à
sa compagne dans un projet de vie à deux: |

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Homme qui construit sa vie avec Dieu, et qui n'est pas "...les
mains vides" (Marc 12,3). Main de l'artiste, qui trace le signe de la Cher'hinah
hébraïque, de la présence divine, qui perçoit le contour de son visage rayonnant et
qui déchiffre le mystère de sa bonté.
4. Histoires de mains:
A) Une main lave l'autre:
Avez-vous essayé de vous laver les mains sans que l'une prête à l'autre son concours?
Vous pouvez barboter, éclabousser, mais difficilement arriver à un résultat
satisfaisant; le frottement manque et c'est le frottement qui est nécessaire.
Laissez-les au contraire travailler de concert: en quelques minutes, l'une d'elles,
fût-ce cette main gauche "dont on dit tant de mal" aura savonné et
débarbouillé sa compagne qui, l'instant d'après, lui rendra ce service, donnant
donnant. Si cela n'était pas chose si naturelle, nous la trouverions admirable.
Amie, ami, ne t'isole pas: quels que soient tes dons, sois persuadé que tu as avantage à
vivre dans le rapport à d'autres personnes. A travailler seul, tu n'arriveras qu'à des
résultats faibles et peu durables. Si, au contraire, tu mets en commun avec quelqu'un tes
espérances et tes expériences tu te sentiras soutenu (deux valent mieux qu'un). Les
lacunes de l'un trouveront compensations dans les capacités de l'autres (et
réciproquement). Et puis vous aurez, dans ce travail à deux, l'occasion de vous
reprendre, de vous pardonner, et c'est le frottement qui est nécessaire. Il permet
d'expliquer, d'éclaircir, de purifier, de préciser, d'éviter les malentendus.
B) Porter et se laisser porter:
Un homme croyant était accablé par un problème difficile qui le touchait de près et
qui mettait sa foi à rude épreuve. Rentrant à la maison avec un paquet pour sa femme,
il s'arrêta auprès de sa petite fille paralysée, assise dans un fauteuil.
"Où est maman?" demanda le papa à sa fille.
"Elle est en haut", lui répondit-elle.
"Bien, je vais lui monter le paquet" dit le père.
"Oh, papa, laisse-moi l'apporter à maman".
"Mais, ma chérie, tu sais bien que tu ne le peux pas".
L'enfant, qui ne se laissait pas abattre par le sort, et qui savait faire preuve de
créativité, répondit, un grand sourire illuminant son doux visage: "Papa,
donne-moi le paquet pour que je le tienne, et toi, porte-moi! Nous allons faire du travail
d'équipe".
Alors, le papa prenant sa coéquipière de fille dans les bras, monta l'escalier, portant
sa fille et le paquet aussi! C'était exactement la même attitude que Dieu avait adoptée
avec chacun de ses enfants: si le croyant se laisse porter par son Dieu, celui-ci porte en
même temps ses fardeaux dont le poids diminue en conséquence.
"Ton Dieu t'a porté comme un homme porte son fils, dans tout le chemin où vous avez
marché..." (Deutéronome 1,31). "Ecoutez-moi...vous que j'ai pris à ma charge
dès votre origine, que j'ai portés dès votre naissance! Jusqu'à votre vieillesse je
vous soutiendrai; je l'ai fait et je veux encore vous porter, vous soutenir et vous
sauver" (Esaïe 46,4).
C) Un éléphant, ça... trompe:
"Moi, j'ai raison... Toi, tu as tord!" "Mon point de vue est le seul qui
soit juste et bon!" Vous l'avez compris depuis longtemps: l'égoïsme et l'orgueil
sont les principales causes de disputes dans les familles, dans la société, entre les
peuples.
Il existe une histoire hindoue, qu'il vaut la peine de
rappeler, pour nous situer à notre vraie place, lorsque nous avons la prétention de tout
savoir et de mépriser l'opinion des autres. Six personnes malvoyantes en Inde n'avaient
jamais eu affaire à un éléphant. Désirant combler ce qui leur apparaissaient comme une
grosse lacune, elles purent toucher un éléphant de leurs mains. |

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La première personne toucha de ses mains ouvertes le côté immense, large et dur du
corps de la bête. Pour elle, ce ventre plat et vertical, c'était clair: "Un
éléphant, s'écria-t-elle, c'est comme un mur!"
La deuxième affleura la pointe d'une défense: "Oh! Mais c'est piquant, rond et
lisse! L'éléphant est semblable à un épieu!"
La troisième, à son tour, saisit la trompe souple et mouvante. Très fière de sa
découverte, elle proclama bien haut: "Un éléphant, c'est comme un serpent!"
"Erreur, triple erreur, s'écria la quatrième qui venait de saisir à plein bras une
des pattes de l'animal... Vous êtes tous en train de vous tromper! Ce n'est ni un mur, ni
un épieu, ni un serpent... C'est pourtant évident, l'éléphant, c'est comme u
arbre!"
La cinquième, par hasard, toucha une oreille et proclama aussitôt avoir enfin découvert
la vérité: "Mes amis, cette palme ondulante, battant l'air lentement...
L'éléphant, c'est l plus beau des éventails!"
La sixième et dernière personnes, parvenant à tâtons par derrière l'éléphant,
saisit la queue mouvante: "Mes pauvres amis, vous êtes vraiment des incapables...
Cette bête que vous cherchez à connaître, elle est comme un câble!"
La suite? Longtemps les gens discutèrent, chacun défendant âprement son point de vue.
Dans son propre secteur, chacun avait raison, mais pourtant ils étaient tous dans
l'erreur.
Alors, si une discussion éclate dans la famille, avec des amis ou dans les affaires, il
est important de se souvenir de l'histoire des six malvoyants et de l'éléphant. Avant de
parler, ou de toucher, il faut savoir écouter, et ne pas prétendre détenir toute la
vérité au creux de sa propre main!
D) Savoir lâcher prise:

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Jean-Michel Martin
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